............Si cette évolution est désormais bien établie,
en revanche on s’interroge sur le moment, les causes , les raisons ou les
mécanismes des différentes acquisitions qui ont marqué
cette Hominisation, c’est à dire ce passage du Primate à
l’Homme. On discute, en particulier la naissance du langage et de la pensée
qui apparaissent comme les deux facultés « réservées
» à l’Homme, celles qui lui ont donné la suprématie
sur toutes les espèces animales. Elles apparaissent si indissociables
que d’aucuns ont pu penser qu’elles relèvent d’une même
structure cérébrale, propre à l’espèce
humaine, et lui donnant en quelque sorte une capacité culturelle
particulière. De la même manière on s’interroge
sur la conscience de l’Homme, sur son existence chez les Primates et sa
différence avec ce qu’elle est chez l’Homme. On cherche également
à définir, et les philosophes grecs le faisaient déjà,
ce que l’on appelle le propre de l’Homme, pour lequel ont été
évoqués, outre le langage et la pensée, la raison,
la fabrication d’outils, la vie en société, le sens moral,
la conscience…
Notre propos, est de montrer que tous ces problèmes deviennent
compréhensibles si l’on part du système nerveux et
plus précisément du cerveau dont ce sont bien la transformation
et les perfectionnements qui, en définitive, différencient
l’homme des Primates. On sait qu’au cours de cette période de 4
à 5 millions d’années le cerveau a triplé du volume
qu’il avait acquis en 60 millions d’années d’évolution des
Primates. On dit parfois que cette augmentation de volume du cerveau
est un fait obligatoire et inéluctable de l’évolution, ou
encore qu’elle est due à l’apparition de nouveaux gènes ou
à des mutations chromosomiques. Nous montrerons que,
en réalité, elle est directement en rapport avec la plus
ou moins importante activité cérébrale qui développe
ou perfectionne les fonctions préexistantes.
Il en est ainsi du langage et de la pensée qui ne sont autres,
dans l’organisation et le fonctionnement du cerveau, que la continuité
et le perfectionnement de fonctions préexistantes. Cette continuité
est évidente pour la pensée, si l’on se réfère
précisément à cette activité corticale
qui existe chez toutes les espèces animales dont le système
nerveux comporte un cerveau recouvert d’une « écorce cérébrale
» ou « cortex » ; elle n’est pas moins évidente
pour le langage, si l’on part de la communication qui existe dans
tous les groupes animaux et qui, chez les Primates est un code, dont
l’apprentissage se fait dans l’enfance.
Pour la conscience, nous montrerons qu’elle n’est autre que l’analyse,
faite par le cerveau, des informations qui arrivent au système nerveux,
provenant du monde environnant et de son propre organisme, Elle dépend,
pour chaque organisme des capacités de l’analyseur qui sont celles
de son cortex. C’est parce que le cortex de l’homme est enrichi du langage
et de la pensée que sa conscience atteint un niveau supérieur.
Toute cette intense activité cérébrale n’a
pu s’exercer que grâce à la survenue, durant cette période,
d’un événement que, pour notre part, nous considérons
comme le plus important de toute l’hominisation, bien que, très
curieusement, il ne soit guère évoqué par tous ceux
qui s’intéressent aux origines de l’Homme, et qui est la prodigieuse
progression de la capacité d’apprendre. Cette exceptionnelle capacité,
infiniment supérieure à celle de toutes les espèces
corticalisées, y compris les primates les plus évolués,
nous apparaît, effectivement , comme « le » fait majeur
de cette hominisation.
|